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Parce que la vie c'est comme ça...
2 février 2009

19 mois, 3 semaines et 1 jour

C'est le temps que mon grand-père a passé au Sanatorium de Montréal. C'était il y a bien longtemps, durant l'épidémie de tuberculose, une maladie pulmonaire extrêmement contagieuse, qui a sévit au Québec. C'était 3 semaines avant qu'il ait dix-sept ans.

Pendant 19 mois, 3 semaines et 1 jour (il s'en souvient très bien), il a enduré toute sorte de traitements. On l'a obligé à rester allité pendant 1 mois entier (la visite au toilette était la seule exception possible). Tous les matins, on lui administrait des injections (sur les fesses à par de ça ).Ça fait 596 piqûres, ça. Il a pourtant été chanceux puisque d'autres, plus gravement atteints, ont subi des traitements expérimentaux, des injections d'air dans les lobes pulmonaires ou dans le pire des cas ils se sont fait enlever deux ou trois côtes pour soulager la pression sur les poumons. «Quand on en voyait un sortir de sa chambre en marchant penché sur le côté, on savait que c'était sa dernière chance. À ce stade là, ça passe ou ça casse», qu'il me disait.

J'ai écouté mon grand-père parler de son séjour à l'hôpital dimanche soir. Il a parler de la maladie, des dortoirs de l'hôpital, du système de santé dans ce temps là, des hommes qui se sauvaient et qu'on retrouvait toujours à la taverne de l'autre côté de la rue. Une taverne qui, ironiquement, affichait fièrement à sa devanture une annonce en néon qui annonçait : "Verres stérilisés". Une maudite chance !

Mais il a surtout parlé de son ennui. 19 mois, 3 semaines et 1 jour à tourner en rond, à attendre la piqûre du lendemain et le résultat du test qui lui dirait enfin si il peut sortir bientôt. Pour passer le temps, il a appris à faire des sacs, des étuis et porte-feuilles en cuirette, matériel que ses parents lui apportaient lors de leurs rares visites. Saint-Antoine Abbé, c'était pas la porte à côté quand même. Puis est enfin arrivé le jour béni où son test de salive est revenu négatif. Il était guéri ! Enfin presque. On le garda encore pour quelques mois au Sanatorium. Il devait avoir plus d'un test négatif pour qu'il soit sûr de ne plus pouvoir contaminé personne. Mais au moins, on l'avait autoriser à sortir, à se promener dans l'hôpital et aux alentours. Il s'était trouvé un nouveau passe-temps ou plutôt, une fonction: contrôleur de l'ascenceur. toute la journée, il montait et descendait les étages, appuyant sur les boutons des étages où les gens avaient besoin d'aller. Imaginez son bonheur quand, plus tard, il a eu la permission d'aller voir sa famille les fins de semaine ! Puis un matin, 19 moi 3 semaines et un jour exactement après son entrée, on l'a autorisé à retourner définitivement chez lui. Il allait bientôt avoir 19 ans...

C'est épouvantable quand même comme histoire, non ? Moi ça me dépasse. Imaginez-vous... la veille de vos dix-sept ans, on vous enlève des bras de ceux que vous aimez, on vous isole du monde dans un grand édifice rempli de malades... pour vous en sortir seulement à l'aube de vos 19 ans. Il y a de quoi devenir fou. Et pourtant mon grand-père il a continué son chemin, un peu déboussolé, et a bâti sa vie de ses mains de menuisiers.

*** J'adore quand mes grand-parents se lancent dans les aventures de leur jeunesse. C'est toujours fascinant... et souvent très divertissant. Faites plaisir à vos grand-parents et écoutez-les leurs histoires. Même si ils les radottent (comme mon grand-père dimanche soir) il y a toujours des épisodes inédits qui finnissent par ressurgir !:P 

       

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Commentaires
M
C'est tellement fascinant comme récit ! On en ferait un livre et je suis certain que ca serait un best-seller ! Et on s'imaginerait que C'est arrivé à un personnage imaginaire tellement ca parrait fou ! Incroyable de croire que ce fut ton grand-père qui a été pris dans cette tumultueuse aventure !
Parce que la vie c'est comme ça...
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